samedi 28 mai 2011

Tunisie: le bras de fer continue autour de la date des élections

Tunisie: le bras de fer continue autour de la date des élections
La commission électorale tunisienne est revenue à la charge jeudi en confirmant le report au 16 octobre des premières élections post-Ben Ali, contre l'avis du gouvernement qui avait maintenu deux jours plus tôt la date du 24 juillet, relançant un bras de fer à l'issue incertaine.
"La Haute instance indépendante chargée des élections a préparé un calendrier qui fixe au 16 octobre l'élection de l'Assemblée constituante", qui verra pour la première fois les Tunisiens voter librement, a déclaré à la presse son président, Kamel Jendoubi.
"La date du 24 juillet ne figure pas dans le calendrier", a-t-il insisté.
Mardi, le gouvernement de transition avait pourtant déclaré que ce scrutin-clé serait maintenu le 24 juillet, ignorant la proposition faite dimanche par la commission électorale de reporter l'élection pour des raisons logistiques.
Le gouvernement avait précisé que le président par intérim, Foued Mebazaa, avait signé un décret-loi entérinant cette date.
Jeudi, le porte-parole du gouvernement, Taïeb Baccouche, a laissé planer le doute sur l'issue du débat. "Le Conseil des ministres se réunira pour en discuter", a-t-il dit à l'AFP.
Mais dès jeudi, le ministre du Commerce et du Tourisme Mehdi Houas est monté au créneau en estimant que la décision revenait au gouvernement.
"Si le gouvernement n'a pas annoncé le report des élections, elles auront bien lieu le 24 juillet", a-t-il affirmé à Alger, en jugeant que la commission électorale était seulement "consultative".
Une majorité de partis politiques est favorable à la date du 24 juillet, notamment le parti islamiste Ennahda et le parti démocrate progressiste (PDP), au nom de la stabilité du pays, dépourvu d'institutions légitimes depuis la chute en janvier du régime de Zine El Abidine Ben Ali.
D'autres, comme le Parti communiste et ouvrier tunisien (PCOT), souhaitent avoir plus de temps pour faire campagne et mettent en garde contre une élection mal préparée.
La commission a de son côté assuré jeudi qu'un report était impératif pour bien organiser le vote, sous peine de jeter le discrédit sur les résultats.
"Nous sommes garants des élections transparentes, libres et démocratiques, qui auront lieu pour le première fois dans notre pays", selon l'un de ses membres, Laarbi Chouikha.
"Or, il est impossible de les organiser à la date fixée par le gouvernement", a-t-il affirmé à l'AFP.
"Nous souhaitons tous que la date de 24 juillet soit maintenue, nous souhaitons tous voter, mais si on le fait dans des conditions non conformes aux standards internationaux, on risque non seulement de rater la prochaine élection mais aussi toutes les opérations électorales à venir", a-t-il fait valoir, en citant notamment les problèmes d'établissement d'une liste électorale crédible en seulement huit semaines.
"Si nous voulons vraiment établir une liste des Tunisiens qui ont le droit de voter, il faudrait entre un mois à 45 jours", a-t-il affirmé.
Le pays doit encore se doter de 1.500 centres d'inscription et former 6.000 agents inscripteurs. Il faudra également organiser l'inscription des Tunisiens de l'étranger, appelés à voter pour la première fois. Le jour de l'élection, 8.000 bureaux de vote et 40.000 agents scrutateurs devront être prêts.
Sur le plan politique, l'électeur risque aussi de s'y perdre. Après un demi-siècle de quasi parti unique sous Habib Bourguiba et Ben Ali, la Tunisie est passée brutalement d'un système de parti-Etat au pluralisme avec plus d'une soixantaine de formations, souvent inconnues du grand public.
le parisien