vendredi 25 février 2011

Des Tunisiens en Libye : « Il faut nous sortir de là !

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Des Tunisiens en Libye : « Il faut nous sortir de là ! »
Par Zineb Dryef | Rue89 | 23/02/2011 | 17H18
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Depuis cinq jours, ils sont une trentaine à ne plus oser sortir de cette maison d'une ville de l'est de la Libye. Les premières manifestations ont fait là plusieurs morts, ils ignorent combien. Tunisiens, ils se sentent menacés.

Joint par téléphone, T. raconte mais réclame l'anonymat complet. Certains de ses compagnons ont menacé de l'expulser de la maison où ils ont trouvé refuge parce qu'ils craignent que les portables soient sur écoute :

« Je crois que dehors, ça s'est calmé. On n'entend plus de bombardements, ni de tirs mais je ne sais pas grand-chose. On n'ouvre ni les fenêtres, ni la porte. On ne veut pas voir, on a trop peur. »

Il s'arrête :

« Je suis désolé. Je suis trop perturbé. Depuis cinq jours, on est enfermés ici et on ne sait pas ce qui peut arriver. On nous a dit : “Vous êtes Tunisiens, vous risquez d'avoir des problèmes.” Ils ont frappé des Tunisiens. Je suis le plus jeune dans cette maison, j'ai peur. Il faut nous sortir de là. »

L'ambassade de Tunisie en Libye les a contactés. Ils devaient être évacués mais la route entre la ville où ils sont coincés et Tripoli n'est pas sécurisée. Pour l'instant, ils sont toujours réfugiés dans cette maison et attendent les instructions des autorités tunisiennes.
A la frontière, le Croissant-rouge soigne les réfugiés blessés

La situation est chaotique dans le pays. Il est difficile de savoir quelles sont les villes tombées entre les mains des manifestants. Misurata ne serait désormais plus sous l'autorité de Kadhafi. (Voir la vidéo)


A Zouara, où les insurgés sont en position de force, les violences continuent. Nous n'avons pu recueillir que ce témoignage, datant de ce mercredi, d'un Libyen :

« J'entends des coups de feu. C'est la guerre, c'est un massacre. »

Cette vidéo tournée le 22 février y montre des protestations massives dans les rues. (Voir la vidéo)


Les réfugiés tunisiens et quelques Libyens arrivent par centaines à Ras Jedir, ville tunisienne à la frontière de la Libye. Sur place, S. les a rencontrés. Ils viennent de Tripoli, Zaouia et Zouara :

« Le Croissant-rouge est sur place. Ils soignent les blessés. On a mis en place des transports gratuits pour que ceux qui le souhaitent puissent rentrer chez eux.

Les gens ont peur. Il y a ceux qui ne veulent pas parler ou qui disent que tout se passe bien en Libye et les autres qui sont terrorisés. Ils n'étaient pas sortis de chez eux depuis plusieurs jours.

J'ai rencontré un type qui s'est fait arrêter pendant trois jours et tabasser par la police. Il était mal. Ils m'ont aussi dit que des Tunisiens avaient été tués. Les Egyptiens sont eux aussi ciblés à cause de leur nationalité. »

Passeports et portables confisqués avant d'atteindre Ras Jedir

Depuis 48 heures, l'Organisation internationale pour les migrations (OIM) a recensé près de 6 000 arrivées à la frontière ; principalement des Tunisiens mais aussi quelques Libyens et des Turcs.

Beaucoup d'entre eux ont été contrôlés à plusieurs reprises avant leur arrivée à Ras Jedir. Leurs passeports et leurs téléphones portables ont été confisqués.